Panthéon : Comment Booba a importé le Gangsta Rap en France ?
1/ Le mouvement d’origine
Le Gangsta Rap est apparu vers la fin des années 80, porté par des artistes de la West Coast comme le groupe N.W.A., Snoop Dogg, 2Pac ou encore Ice T.
Le rappeur qui nous intéresse a sorti son premier album en 2000 et son plus gros succès en 2003, je parle évidemment de 50 Cent avec Get Rich Or Die Tryin’.
Le rappeur originaire du Queen basait sa direction artistique sur une idée très simple : être le meilleur. 50 Cent faisait tout pour montrer sa supériorité en affichant son argent, ses voitures, ses escorts et surtout le fait qu’il était intouchable (de par le mythe selon lequel il se serait pris 9 balles dans le corps et aurait survécu). Montrer constamment qu’on est le meilleur, c’est une idée qui plaît bien à un rappeur altoséquanais âgé de 28 ans se projetant sur son nouvel album.
2/ L’avant Panthéon
On est en 2004, 2 ans auparavant le Duc de Boulogne avait marqué le Rap Français au fer rouge avec ce qui est considéré comme son plus gros classique : Temps Mort.
Après un disque d’or en indépendant, Booba comprend que s’il veut être le meilleur, il va devoir innover. C’est donc en quête de nouveauté que le Duc va découvrir le rappeur new-yorkais énoncé plus tôt. Booba a adoré la D.A. de 50 Cent et décide que son prochain album Panthéon sera grandement inspiré par son confrère américain.
3/ Panthéon
11 mai 2004 : sortie de Panthéon
Pour bien commencer un album, quoi de mieux que de l’introduire efficacement, et c’est ce que Booba a fait. Tallac est une énorme claque qui vient rappeler que le Duc n’est pas n’importe qui dans ce Rap Game. Produit par Skread, le morceau est sûrement l’un des plus mythiques de sa carrière. Dans cet album, on peut retrouver pas mal de rappeurs affiliés au 92i de l’époque comme Mala, Sir Doum’s, Nessbeal, I2S ou encore Brams. Il y a aussi Wayne Wonder et Leya Masry qui apportent un peu de chant sur le projet. Panthéon de Booba possède aussi un tube avec le morceau N°10. De par son instrumental et ses paroles glorieuses, le son aura su marquer les esprits encore jusqu’à aujourd’hui. Malgré quelques phases problématiques et quelques instrumentales plutôt datées (Commis D’Office, Baby, Pazalaza Pour Sazamuser ou Bâtiment C),
sur Panthéon on peut trouver de très bons textes Ego Trip mêlés à des textes plus introspectifs, le tout chapeauté par des productions pour la plupart excellentes. L’inspiration de 50 Cent se ressent beaucoup de par la cover par exemple, malgré tout, Booba n’applique pas bêtement une formule. Le rappeur originaire des Hauts-de-Seine a su imposer son style pour rendre son projet unique. Panthéon a fourni plusieurs classiques du Duc comme Tallac, N°10, Hors-Saison, La Faucheuse ou encore Mon Son. Par contre, on ne retiendra pas Baby avec Nessbeal qui a horriblement mal vieilli.
Après cette mise en contexte, cela paraît impossible que cet album soit considéré comme l’un des pires de Booba, non ?
4/ L’après Panthéon
Même si aujourd’hui le travail de la DA et de l’image est quelque chose de courant dans le Rap Français, à l’époque beaucoup moins. Le rap, c’était pour raconter sa vie peu importe à quoi elle ressemblait. Panthéon marque donc un tournant, on passe d’un rappeur qui raconte la vie en banlieue et ses difficultés à un rappeur qui se vante d’avoir beaucoup d’argent et de femmes, mais qui reste un personnage.
Même si le succès commercial est au rendez-vous grâce aux deux morceaux joués en radio (N°10 et Avant De Partir avec Leya Masry), le succès critique, lui, n’est pas là. En effet, la critique a été très dure avec le projet à cause du virage artistique pris par Booba (ce qui est dommage car l’album ne se résume clairement pas qu’à ça).
Booba a ramené le Gangsta rap en France avec Panthéon en 2004, le public n’a pas apprécié ce style.
En 2006 cependant, le Duc réussi cette fois-ci à démocratiser le Gangsta Rap et à le rendre Mainstream avec Ouest Side. Panthéon est donc l’ébauche de ce qui sera une des plus grosses révolutions qu’ait connu le Rap Français.
Ce n’est pas la première fois que Booba a révolutionné le Rap Français, et ce n’est pas la dernière fois non plus.
Mais ça, c’est pour une prochaine fois…
écrit par SFP le 31/07/2023